L’UE préparerait un plan pour investir les fonds russes gelés et générer des bénéfices, selon Politico

L’Union européenne préparerait un plan pour transférer près de 200 milliards d’euros d’avoirs russes gelés, actuellement chez Euroclear en Belgique, vers un fonds d’investissement plus risqué. L’objectif serait de générer davantage de bénéfices à reverser à l’Ukraine, tout en contournant les obstacles juridiques liés à la confiscation de ces fonds.
Bruxelles examinerait la possibilité de déplacer environ 200 milliards d’euros d’avoirs russes gelés, actuellement déposés chez Euroclear en Belgique, vers un fonds d’investissement « plus risqué » sous l’égide de l’UE, selon un article de Politico publié ce 19 juin. Cette initiative vise à générer un rendement plus élevé que les taux offerts par la Banque centrale belge, afin d’accroître les versements à l’Ukraine.
L’Union européenne affirme qu’elle ne touchera pas au capital gelé, mais uniquement aux intérêts générés, pour éviter les accusations de violation du droit international. Certains États membres, comme l’Allemagne et l’Italie, refusent toute confiscation directe, ce qui pousse la Commission à chercher des solutions indirectes.
Le plan consisterait à transférer les avoirs dans une « structure spéciale » sous contrôle européen, afin de permettre des investissements dans des produits plus rentables. Toutefois, les responsables européens n’ont donné aucun détail sur le type de placements envisagés, ce qui soulève des inquiétudes quant aux risques réels de pertes financières.
Euroclear a déjà dégagé 1,47 milliard d’euros de profits au dernier trimestre, en respectant les règles d’investissement sans risque via la Banque centrale belge. L’UE juge ce rendement insuffisant dans le contexte actuel du conflit en Ukraine et du retrait américain, alors que le président Donald Trump a annoncé vouloir cesser l’aide directe à Kiev.
Des discussions urgentes, un budget sous tension
Les ministres des Finances des 27 pays de l’UE se retrouvent ce 19 juin à Luxembourg pour un dîner informel où cette proposition est discutée, comme le rapporte Politico. La présidence tournante polonaise appelle à « entendre de la Commission les options disponibles concernant l’utilisation des actifs gelés et la suite des sanctions ».
Bruxelles cherche une solution rapide, car l’UE a déjà promis 18 milliards d’euros issus de ces profits dans le cadre du prêt G7 à l’Ukraine. Ce montant sera totalement versé d’ici fin 2025. Une grande partie des 50 milliards décidés en 2023 pour soutenir l’Ukraine jusqu’en 2027 est également déjà dépensée. Le budget central de l’UE étant saturé, aucun nouveau fonds n’est prévu avant 2028.
Cette initiative pourrait aussi servir à contourner un problème politique : le renouvellement du régime de sanctions contre la Russie doit se faire tous les six mois à l’unanimité. Or, la Hongrie menace régulièrement de voter contre, ce qui rendrait les avoirs gelés restituables.
Pour éviter cela, des responsables européens proposent de transférer les fonds dans une structure spéciale créée par l’UE, indépendante du régime de sanctions. Cette nouvelle entité pourrait être établie par majorité qualifiée, ce qui empêcherait la Hongrie d’y opposer son veto. L’objectif est donc de garantir que les actifs russes restent bloqués, même si le cadre légal des sanctions venait à disparaître.
Moscou dénonce un vol
La Russie dénonce ces manœuvres comme du « vol » pur et simple. Le ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, a averti que toute tentative de confiscation aurait des conséquences juridiques. Depuis le début des sanctions en 2022, la Russie répète que ces actions ciblent illégalement non seulement des personnes privées, mais aussi les actifs d’État.
Le gouvernement russe souligne aussi que, si ses avoirs ne sont pas restitués, il se réserve le droit de prendre des mesures équivalentes contre les biens occidentaux sur son territoire.