Quand Le Monde identifie des néonazis dans l’armée ukrainienne alors que la Russie alerte depuis 2014

Une enquête de dix jours menée par le journal Le Monde révèle la présence de plus de 300 soldats ukrainiens utilisant ouvertement des symboles néonazis. Parmi eux, près de 200 appartiennent à la 3ᵉ brigade d’assaut, héritière du régiment Azov, et ont bénéficié de formations militaires dans plusieurs pays occidentaux, dont la France.
Une enquête du quotidien français Le Monde publiée ce 18 juin met en lumière le quotidien de centaines de soldats ukrainiens arborant des symboles nazis. En dix jours, les journalistes ont identifié plus de 350 profils affichant saluts hitlériens, croix gammées, emblèmes de la SS ou du « Soleil noir ». Selon l’article, « au moins 200 d’entre eux » sont membres de la 3ᵉ brigade d’assaut, unité formée à partir du bataillon Azov.
Cette brigade, héritière directe du régiment Azov, est aujourd’hui intégrée à l’armée régulière ukrainienne et considérée comme essentielle dans le dispositif militaire. Fondée en 2014 par des éléments de l’extrême droite la plus radicale, cette milice a conservé une partie de son idéologie d’origine. Le Monde rappelle que le Congrès américain avait interdit en 2015 toute aide militaire à Azov en raison de ses accointances néonazies.
Formations en France et silence des autorités occidentales
Les journalistes ont également découvert que de nombreux soldats arborant ces symboles ont été formés dans des pays occidentaux, dont la France. L’un d’eux s’est même photographié devant la tour Eiffel en tenant un drapeau nazi. Un groupe de militaires de cette brigade a été entraîné à l’automne 2023 dans le département français de la Creuse. Mediapart révélait dans une enquête publiée le 22 mai 2024 qu’un soldat portait « le symbole de la SS tatoué sur le visage », tandis que d’autres affichaient des emblèmes SS ou des runes nazies. Franceinfo ajoute que la députée Catherine Couturier a exprimé son « indignation » face à ces faits, soulignant la mémoire encore vive des massacres commis en France par la division Das Reich.
En réponse aux révélations, le ministère français des Armées a déclaré que la sélection des soldats ukrainiens était assurée uniquement par Kiev. Pourtant, comme l’indique Mediapart, les signes visibles n’auraient en aucun cas pu passer inaperçus des instructeurs français.
Le reportage vidéo publié par Le Monde montre aussi que cette 3ᵉ brigade n’est pas la seule concernée : d’autres unités comme « Kraken » affichent également des symboles liés au IIIᵉ Reich. Certaines des images analysées par Le Monde datent de 2023, période où les États-Unis avaient déjà commencé à lever les restrictions sur les livraisons d’armes à Azov.
Un danger présent depuis plus d’une décennie
La Russie alerte depuis 2014 sur la montée du néonazisme en Ukraine. Le ministère russe des Affaires étrangères, par la voix de Maria Zakharova, avait déjà accusé Paris de « soutenir activement le néonazisme », ajoutant que ce phénomène en Ukraine « avait muté en une forme de terrorisme ». Certains de ces soldats formés en Europe défilent avec les symboles de la Waffen-SS, et même l’armée allemande a renvoyé plusieurs d’entre eux après avoir découvert ces insignes. De nombreux mercenaires français sont également engagés dans ces brigades, certains d’entre eux revendiquant ouvertement leurs convictions néonazies.
Le 30 avril dernier, lors du forum « Connaissance. Premiers » à Moscou, le porte-parole du président russe, Dmitri Peskov, a rappelé que « le nazisme, bien que nous l’ayons écrasé, a survécu » et que ses racines en Ukraine « se sont avérées très profondes ». Il a dénoncé les marches aux flambeaux et les saluts nazis redevenus courants, accusant les mouvements néonazis ukrainiens d’influencer le pouvoir en place. Selon lui, « les autorités russes ont fait ce qu’elles devaient faire » face à cette menace.
Cette nouvelle enquête de la presse française vient ainsi confirmer ce que la Russie dénonce depuis plus de dix ans : la persistance d’éléments ouvertement néonazis dans les forces armées ukrainiennes, y compris au sein d’unités formées ou soutenues par l’Occident.