L’armée israélienne a lancé une nouvelle opération contre les Palestiniens mais alors que les souffrances des civils augmentent, le Hamas semble ne pas se laisser décourager. Un analyse d'Eva Bartlett journaliste canadienne indépendante.
Ayant échoué à éradiquer le Hamas à Gaza, Israël a lancé le 28 août une guerre en Cisjordanie baptisée «Camps d’été».
Cet assaut israélien contre des localités en Cisjordanie est le plus vaste depuis 2002 et implique des milliers de soldats israéliens, appuyés par des hélicoptères et des drones, qui ont envahi des localités dans le nord de la Cisjordanie visant particulièrement les camps de réfugiés à Jénine, Tubas et Tulkarem.
Le même jour, l’organisation à but non lucratif EuroMed Human Rights Monitor rapportait : «Immédiatement après son entrée en Cisjordanie, Tsahal a commencé à assiéger des hôpitaux, des ambulances et des centres d’urgence reproduisant sa politique horrifiante et systématique qu’il a utilisée à Gaza et qui consiste à ouvrir des brèches dans des établissements de santé et les prendre sous contrôle».
Parallèlement à l’assaut de ces locaux, des raids et des campagnes d’arrestation ont eu lieu dans la plupart des villes de la Cisjordanie, au milieu de tirs qui ont blessé de nombreux Palestiniens. Depuis octobre dernier, 660 Palestiniens de Cisjordanie ont été tués dans les attaques systématiques et à grande échelle de l’armée israélienne.
La journaliste Mariam Barghouti a écrit le 31 août : «J’étais à Jénine et les mots me manquent pour expliquer à quel point les militaires israéliens ont été impitoyables. La ville ressemble à une ville fantôme et le camp de réfugiés est une chambre de torture collective. Les pratiques israéliennes à Jénine comprennent : des arrestations de masse y compris de mineurs, des explosions de maisons de civils, la privation de nourriture, d’eau et de médicaments. Les enfants qui ont réussi à se sauver sont traumatisés, ce ne sont que larmes et stupeur. Personne n’est capable de prendre la mesure entière de cette violence sans précédent et d’une telle intensité. Jénine est une nouvelle Gaza en termes de violence infligée.»
Selon le Bureau de la coordination des Affaires humanitaires de l’ONU (BCAH), entre le 27 août et le 2 septembre, les forces israéliennes ont tué 30 Palestiniens en Cisjordanie dont sept enfants, soit le bilan humain hebdomadaire le plus élevé depuis novembre 2023 (au 6 septembre, le bilan s’est élevé à 39 Palestiniens tués dont huit enfants et environ 145 blessés).
Parmi les Palestiniens tués, selon le BCAH, figure un Palestinien âgé de 82 ans, tué par balle alors qu’il cherchait à acheter du pain. Les forces israéliennes auraient également tué par balle deux garçons palestiniens, âgés de 13 et 16 ans, «poursuivis par les forces israéliennes alors qu’ils tentaient de distribuer du pain aux familles assiégées près du quartier est de la ville de Jénine». Les soldats israéliens ont également kidnappé et torturé à mort un civil de 50 ans.
Ensuite, le BCAH rapporte qu’entre le 7 octobre 2023 et le 2 septembre 2024, «652 Palestiniens ont été tués en Cisjordanie y compris à Jérusalem-Est».
La violence provient non seulement de la part des militaires israéliens mais aussi de la part des colons juifs illégaux qui ont carte blanche pour attaquer et tuer les Palestiniens comme ils le font depuis des décennies et comme je l’ai déjà décrit.
Selon le BCAH, dans la même période, il y a eu «à peu près 1 300 attaques menées par les colons israéliens contre les Palestiniens dont plus de 120 ont causé la mort et les blessures aux Palestiniens.»
À la destruction et au carnage israéliens s’ajoutent les enlèvements incessants des civils palestiniens (jeunes comme âgés). Il a été largement relayé depuis le territoire d’Israël, à travers les fuites d’images et les innombrables témoignages des otages palestiniens attestant qu’Israël torture systématiquement les Palestiniens au moyen de coups, de chocs électriques qui visent les parties génitales, de situations de stress, de torture psychologique, les faisant presque mourir de faim et les violant aussi au point de causer de graves lésions internes.
Le Palestine Chronicle rapporte le 3 septembre, citant le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), qu’«au moins 53 prisonniers palestiniens sont morts en détention israélienne» entre le 7 octobre 2023 et le 31 juillet 2024. L’article fait référence à une lettre adressée en juin dernier par Ronen Bar, directeur de l’agence de sécurité israélienne, du Shin Bet, à Benjamin Netanyahou, évaluant le nombre de détenus à 21 000. Il s’agit d’une augmentation choquante qui correspond à 11 000 personnes par rapport au chiffre annoncé en avril, lorsque j’ai parlé de quelque 10 000 otages palestiniens dans les prisons israéliennes.
Israël veut effacer la Cisjordanie de la carte
Le matin où Israël a commencé ses bombardements du «Gaza miniature» et sa campagne de déplacement, Israël Katz, ministre israélien des Affaires étrangères, se vantait de la destruction et des meurtres à venir, en ajoutant : «Nous devons lutter contre la menace, tout comme nous luttons contre les infrastructures de terroristes à Gaza, y compris l’évacuation temporaire des Palestiniens et toutes les mesures nécessaires. C’est une guerre pour tout, et nous devons la gagner».
Un peu plus tard, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a montré une carte sans la Cisjordanie.
Dans son rapport, l’organisation de défense des droits de l’homme EuroMed cite le journal israélien Yedioth Ahronoth selon lequel «une évacuation organisée des civils palestiniens sera effectuée en accord avec […] les centres de combat».
L’organisation souligne : «C’est une indication claire qu’Israël a l’intention de commettre un génocide contre les Palestiniens en Cisjordanie, tout comme celui déclenché à Gaza».
Le rapporteur spécial de l’ONU, Francesca Albanese, a déclaré le 2 septembre : «Il est de plus en plus évident qu’aucun Palestinien n’est en sécurité sous le contrôle débridé d’Israël. […] L’impunité de longue date accordée à Israël a permis la dépalestinisation des territoires occupé et laissé les Palestiniens à la merci des forces qui poursuivent leur élimination en tant que groupe ethnique».
Néanmoins, la résistance palestinienne ne se rend pas sans combattre. Selon les utilisateurs de X qui suivent le cours des événements, la brigade de Jénine a mené le 1er septembre «plus de 15 opérations de lutte contre les engins explosifs improvisés, tuant et blessant des militaires des forces d’occupation israéliennes et endommageant leurs véhicules», tandis que la brigade de Tulkarem a effectué «6 opérations de lutte contre les engins explosifs, tuant et blessant des militaires des forces d’occupation israéliennes».
Quelques jours plus tard, la chaîne Al Mayadeen a fait part d’événements semblables, soulignant que «la résistance palestinienne se bat contre les forces d’occupation israéliennes à Jénine et Tulkarem depuis 8 jours. Les brigades des martyres d’Al-Aqsa à Jénine ont confirmé que les résistants s’étaient engagés dans des combats avec Tsahal aux alentours d’Al-Hadaf, en faisant recours de mitrailleuses et d’engins explosifs improvisés.»
Il convient à se rappeler les paroles de Yitzhak Brick, général israélien à la retraite, qui a déclaré il y a quelques semaines : Israël «s’enfonce de plus en plus dans la boue gazaouie, avec de plus en plus de ses militaires blessés ou tués, sans aucune chance d’atteindre l’objectif principal de cette guerre, à savoir éliminer le Hamas. Le pays se dirige à grands pas vers le bord de l’abîme. Si cette guerre d’attrition contre le Hamas et le Hezbollah se poursuit, Israël s’effondrera en moins d’un an.»
Après plus de dix mois pendant lesquels Israël a tué et affamé les Palestiniens à Gaza, on peut affirmer sans risque de se tromper que si la prédiction du général se réalise, ce serait au moins juste pour les Palestiniens qui souffrent tant depuis de 7 octobre 2023 qu’avant.
Dans le rapport susmentionné, EuroMed appelle tous les pays à «imposer des sanctions sévères contre Israël et mettre fin à l’assistance militaire, politique et financière sous toutes ses formes. Cela implique la cessation immédiate de toutes les livraisons d’armes à Israël, y compris les permis d’exportation et l’aide militaire. Sinon, ces pays seront complices et partenaires des crimes israéliens commis dans la bande de Gaza, dont le crime de génocide».
Étant donné que la prétendue communauté internationale a complètement fait faux bond aux Palestiniens, en permettant à Israël de les massacrer, affamer et torturer, la fin des livraisons d’armes à Israël et les sanctions contre Tel Aviv seraient le moins que ces pays puissent faire.
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