Que faire de l’Ukraine ? Faute d’une victoire à court terme, comment, au minimum, continuer cette guerre contre la Russie ? Perdre est impensable, cela entraînerait la chute des élites globalistes. Les élites globalistes paniquent. Comme le rappelle Karine Bechet-Golovko, la peur pousse à la faute. L’Europe ne s’en relèverait pas.
L’élection de Trump a fait souffler un vent de panique chez les élites globalistes en Europe : privées de leur Père et Guide, elles se trouvent soudainement orphelines, désarmées et impuissantes, notamment face au conflit en Ukraine, qu’elles ne sont objectivement pas en mesure d’assumer seules. Face à un combat qu’elles ne peuvent se permettre de perdre.
Pour autant, il n’est pas certain, que Trump cesse réellement d'aider l’Ukraine lorsqu’il entrera en fonction en janvier. Il n’a pas l’intention de commencer son second mandat par une défaite.
C’est l’incertitude qui inquiète le plus les élites globalistes en Europe. Elles ont besoin de garanties et Trump a besoin de les soumettre, donc de les laisser le plus longtemps possible dans l’incertitude. Pour pouvoir les cueillir le moment venu.
En attendant, tous les scénarios sont envisagés. Celui de potentiels « plans de paix » tient le haut de l’affiche. Et ce d’une manière particulièrement irrationnelle, ce qui est le propre des temps troublés. Le NYT l’affirme clairement : «"La question territoriale est extrêmement importante, mais elle reste secondaire", a déclaré un haut responsable ukrainien. "La première question concerne les garanties de sécurité." Kiev ne renoncera pas officiellement à ses revendications territoriales, a indiqué un haut responsable ukrainien. Mais il pourrait être disposé à justifier un accord dans lequel la Russie conserverait le contrôle des territoires contestés et l’Ukraine obtiendrait son adhésion à l’OTAN ou un accès sûr au stock d’armes de l’Occident.»
Cette idée est reprise d’une manière générale dans les différentes analyses : la reconnaissance territoriale ne peut être que temporaire et de facto pour mettre la Russie à la table des négociations, aucune reconnaissance de jure de la modification des frontières étatiques russes n’est jamais envisagée. Le but est simplement de gagner du temps pour permettre d’intégrer l’Ukraine dans l’OTAN et de renforcer ses capacités d’agression contre la Russie. Pour reprendre la guerre, à plus forte intensité, le moment venu.
La France, fille aînée de l’Atlantisme, l’exprime simplement par la voix de son ministre des Armées, la guerre devra continuer après «la paix» : «Nous devons maintenir notre aide de façon durable. (...) D’abord, nous poursuivrons le programme de formation inédit dans le Grand Est de la France, où 2 000 soldats ukrainiens sont formés en brigade par des Français, sur du matériel français».
Dans cette logique, les élites globalistes en Europe se trouvent confrontées à une alternative assez simple : soit Trump, finalement, les rejoint tactiquement, car il pense pouvoir obtenir une victoire rapide en intensifiant le combat contre la Russie et en diversifiant les fronts (militaire, mais aussi idéologique en jouant sur le terrain des valeurs traditionnelles et de la remise en cause de certains cultes globaux, comme par exemple le réchauffement climatique) ; soit Trump ne les rejoint pas et dans cette configuration d’une fracture temporaire des élites globalistes (en modérées – avec Trump, et extrêmes ou radicales – en Europe), elles se doivent d’assurer la continuité du conflit en Ukraine, qui est leur étendard géopolitique, et de préparer leur retour en désamorçant Trump, comme elles l’ont fait lors de son premier mandat.
Dans cette configuration, les élites globalistes en Europe ont de toute manière besoin d’être en position de force. C’est la raison pour laquelle nous assistons à un durcissement de l’intolérance politique face aux partis comme le RN, qui ayant une véritable assise populaire, ont un potentiel à ce jour non réalisé, mais qui peut le devenir dans la vague trumpienne. Par ailleurs, les décisions d’aide immédiate «à l’Ukraine» s’enchaînent aux États-Unis et en Europe, afin de mettre Trump face à un fait accompli et lui forcer la main.
Reste un pas à faire. À ce jour, les instances européennes se sont résolues à n’utiliser que le produit des 300 milliards d’actifs russes, qui sont principalement en Europe. Comme si la spoliation était moins grave si elle ne touchait pas le capital, alors que juridiquement le droit de propriété sur un bien s’étend aux produits de ce bien, sauf décision du propriétaire du bien de se défaire au profit d’une tierce personne du fructus. La Russie n’ayant pas pris cette décision, l’appropriation des produits des actifs russes en Occident est illégale.
Mais en temps de guerre, la politique a ses raisons que le droit ne connait pas.
Désormais la pression politico-médiatique se dirige vers l’utilisation directe des actifs eux-mêmes. 300 milliards d’euros, ça donne des idées... Zelensky le demande depuis longtemps, estimant que cela correspond à deux années de soutien de cette guerre pour laquelle il met son pays à disposition. L’idée est désormais soutenue ouvertement par la députée française au Parlement européen Nathalie Loiseau, qui déclare : «L’argent nécessaire au soutien à l’Ukraine existe. Il est russe et il se trouve dans les banques européennes. Prenons l’argent de l’agresseur pour soutenir l’agressé. Assez de discours. Des actes.».
L’idée reste toujours formellement la même : la Russie serait l’agresseur, elle est donc obligée de financer.
Mais de financer quoi ? En général, il s’agit du financement de la reconstruction. Or, ici, il s’agit de financer la poursuite du conflit. Dans le premier cas, il s'agit logiquement d'intervenir à la fin du conflit, et non pas lorsqu’il est en cours ; la décision doit alors être formalisée par une instance représentant les vainqueurs, or les Atlantistes sont loin d’être les vainqueurs en Ukraine. Bref, cette idée manque et de légalité, et de légitimité.
Nous sommes certes dans le cadre du «droit de l’ennemi», mais l’Europe n’a pas déclaré la guerre à la Russie, même si elle la combat bien sur le terrain. Comment justifier alors cette décision ? C’est simplement impossible, c’est une impasse. Les conséquences d’une telle décision pourraient donc être désastreuses pour l’Europe.
Si la Russie est extrêmement patiente et réagit légèrement aux différentes agressions, qu’il s’agisse de l’utilisation des armes et de l’artillerie européenne contre elle, de la formation et du financement d’une armée atlantico-ukrainienne la combattant ou des différentes sanctions et mesures unilatérales politiques, cela ne veut pas dire qu’elle ne répondra jamais. L’Europe serait alors en première ligne, là où elle est mise par ces élites, qui ne sont ni françaises, ni allemandes, ni britanniques, ni «européennes», mais bien globalistes. Donc des élites par définition apatrides.
Enfin, une violation aussi brutale du droit de propriété dans « la patrie du libéralisme » ne pourra pas rester sans affecter la réputation des institutions financières occidentales. Comme nous sommes, en général, dirigés par des financiers et des commerçants, faute de patriotisme, comptons au moins sur leur instinct de survie pour ne pas commettre cette erreur stratégique qui pourrait nous être fatale.
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