Les réactions se multiplient en France après le meurtre raciste d’un Tunisien dans le Var

Le meurtre raciste d’un Tunisien dans le Var a suscité une série de réactions de la classe politique et de la Grande mosquée de Paris. Indignation et dénonciation ont fusé à droite comme à gauche, mais aussi de la part du ministère de l’Intérieur tunisien face à ce crime «antimusulman».
Un meurtre raciste a secoué la France au soir du 31 mai dernier à Puget-sur-Argens dans le Var. Un homme, de nationalité française, a tué l’un de ses voisins, Hichem Miraoui, de nationalité tunisienne, et en a blessé un autre, de nationalité turque. Le suspect avait posté des vidéos racistes avant et après son passage à l’acte, a indiqué le procureur de Draguignan dans la journée du 1ᵉʳ juin.
Le ministère tunisien de l’Intérieur condamne le crime
Le ministre de l’Intérieur tunisien, Khaled Nouri, a « condamné un crime terroriste », soulignant qu’il a « suscité un profond mécontentement et une profonde tristesse dans l’opinion publique » tunisienne, au soir du 2 juin. Il a souligné, lors d’un entretien téléphonique avec son homologue français Bruno Retailleau, « la nécessité d’assurer la protection de la communauté tunisienne sur le territoire français », selon un communiqué officiel. Le ministre tunisien a d’ailleurs demandé à son homologue français d'« adopter une approche proactive pour éviter de tels crimes et garantir qu’ils ne se reproduisent pas ».
Le communiqué du ministère de l’Intérieur tunisien a rapporté les propos de Bruno Retailleau qui a exprimé « sa ferme condamnation de ce crime raciste ». Ce dernier a aussi présenté les condoléances du gouvernement français à la famille de la victime, assurant que l’auteur du crime « qui ne représente pas la société française ni les valeurs de l’État français » sera puni « de la peine maximale ».
Retailleau : « un crime sans doute antimusulman »
Interpellé, ce 3 juin, à l'Assemblée nationale par une députée LFI sur l'assassinat d'un Tunisien à Puget-sur-Argens dans le Var, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau a déclaré : « c’est clairement un crime raciste, c’est un crime sans doute aussi antimusulman et peut-être aussi un crime terroriste puisque le Pnat (Parquet national antiterroriste, NDLR) a été saisi ».
Et d’ajouter : « Je veux dire de la façon la plus nette, le racisme, ça n’est pas la France, le racisme est un poison, c’est un poison qui tue. Et précisément, c'est un crime barbare, bien sûr. Et précisément, la France et la République ne font aucune différence entre la couleur de la peau, les origines ou bien les croyances. Croyez-moi, je suis très heureux que le Pnat s’en soit saisi et j’espère que la justice sera intraitable et implacable pour ce qui constitue un crime antifrançais. Chaque crime raciste est un crime antifrançais ».
La gauche fustige un « racisme d’atmosphère »
Lors d’un entretien accordé à la chaîne de télévision TF1, Olivier Faure, le premier secrétaire du Parti socialiste (PS) a accusé le gouvernement français d’entretenir un « climat de suspicion vis-à-vis des étrangers ».
« Je ne vais pas accuser Bruno Retailleau d’un crime qu’il n’a pas commis », a déclaré Olivier Faure, mais il indique que le ministre de l’Intérieur assume une part de la responsabilité du meurtre raciste commis dans le Var.
Dénonçant une « forme de banalisation du racisme » devenue désormais une « forme légitime d’expression » en France, Olivier Faure a considéré que Retailleau « laisse penser qu’il y a aujourd’hui une menace qui serait liée à la confession de quelques-uns ». Il faisait certainement allusion au rapport sur les Frères musulmans et l’islamisme politique en France, rendu public par le ministère de l’Intérieur et condamné par la gauche française qu’elle considère comme un moyen de stigmatisation des musulmans dans le pays.
Le leader du PS a reproché au ministre de l'Intérieur de « chercher à créer une forme de racisme d’atmosphère » ou du moins à le « laisser perdurer et laisser penser que ce n’est pas une pensée absurde ».
Pour sa part, le leader de La France insoumise (LFI), Jean-Luc Mélenchon, a déploré un « infâme meurtre raciste » dans une publication sur son compte X. « Ne laissons pas l'officialité attiser la haine raciste en la légitimant. Ceci est le message de compassion pour la famille agressée. Tous les Français informés pensent de même et constatent la faillite dangereuse de Bruno Retailleau », a ajouté l’ancien député européen.
La Grande mosquée de Paris dénonce la haine « dans les sphères politiques et médiatiques »
Dans la foulée des réactions contre ce crime de haine, le recteur de la Grande mosquée de Paris, Chems-Eddine Hafiz, a dénoncé les discours « racistes et islamophobes » qui conduisent « à des faits d'une extrême gravité ».
« Face à cet acte terroriste, la Grande mosquée de Paris appelle à une prise de conscience urgente et nationale sur le danger des discours xénophobes, racistes et islamophobes », a-t-il déclaré dans un communiqué. « Il est temps de s'interroger sur les promoteurs de cette haine qui, dans les sphères politiques et médiatiques, sévissent en toute impunité et conduisent à des faits d'une extrême gravité », a-t-il assené. Face à ce crime « d'une violence inqualifiable », le recteur de la Grande mosquée de Paris a affirmé que « quelques semaines après l'assassinat d'Aboubakar Cissé dans une mosquée du Gard, une même haine, aveugle et barbare, a frappé une nouvelle fois ».