Le lauréat du célèbre prix World Press Photo interdit d’assister à la cérémonie... car il est russe

L’organisation du prestigieux concours de photojournalisme World Press Photo a annoncé le retrait de l’invitation adressée à Mikhail Tereshchenko, photographe russe de l’agence TASS, pour la cérémonie de remise des prix prévue en mai à Amsterdam. Une décision justifiée par la «tension accrue sur le continent européen».
Les organisateurs du concours de photojournalisme World Press Photo ont annulé l’invitation adressée à Mikhail Tereshchenko, photographe russe de l’agence TASS, pour la cérémonie de remise des prix prévue en mai prochain à Amsterdam (Pays-Bas).
Mikhail Tereshchenko avait remporté la sélection régionale européenne dans la catégorie « Série photo », avec des clichés réalisés lors des manifestations anti-gouvernementales en Géorgie. Ses travaux restent en lice pour le titre de « photo de l'année », dont le résultat sera dévoilé le 17 avril. Cependant, l’organisation a estimé ne pas pouvoir l’accueillir aux célébrations, invoquant un contexte géopolitique tendu, et a décidé de retirer son invitation pour la cérémonie prévue aux Pays-Bas.
Cette exclusion a suscité l’indignation des autorités russes. Maria Zakharova, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, a qualifié cette décision d’« acte d’autodestruction ». « C’est tellement honteux qu’il vaudrait mieux se taire. Une question se pose : les photos pour le concours ne seront-elles acceptées qu’avec des sujets neutres, illustrant la nature, des petits fleurs, des papillons ? », a-t-elle ironisé sur Telegram. Elle a rappelé que l’agence TASS avait non seulement participé à ce concours par le passé, mais qu’elle avait remporté de grands prix. De 1956 à 1992, les photos de TASS ont remporté plus de 25 fois des prix de ce concours, contribuant à sa renommée.
Une décision allant « à l’encontre du bon sens et de l’esprit de solidarité journalistique »
« Ce que nos collègues d’hier appellent "montée de la tension sur le continent européen" n’est en fait que la déficience accrue du continent européen due à la perte par ses sujets de toute souveraineté créatrice professionnelle et plus important encore, spirituelle et intellectuelle », a noté le directeur général de TASS, Andreï Kondrachov.
« Un auteur russe ne pourra pas être le meilleur dans le monde, suivant leur logique, parce qu’il est russe. Dommage pour l’Europe car le remède sera encore plus difficile à trouver que la maladie actuelle », a-t-il déclaré.
Dmitri Peskov, porte-parole du Kremlin, a regretté cette décision : « Bien sûr, cela va à l’encontre du bon sens et de l’esprit de solidarité journalistique. »
De son côté, Mikhail Tereshchenko a réagi avec philosophie : « C’est une compétition sérieuse et importante. Je suis heureux d’y avoir participé et d’avoir gagné. La Russie figure sur la liste des vainqueurs. C’est le plus important pour moi. […] Continuons à travailler. » Il a salué la reconnaissance de l’excellence visuelle de son travail par le jury.
Interrogée par TASS, l’Unesco n’a pas commenté cette affaire, laissant planer un doute sur la position des institutions internationales chargées de défendre la liberté de la presse. Alors que World Press Photo affirme respecter l’indépendance de son jury, cette polémique soulève des questions sur la politisation croissante des sphères culturelles en temps de crise géopolitique.