Après plus de 50 ans de dispute territoriale, le Royaume-Uni reconnaît la souveraineté de l'île Maurice sur l'archipel des Chagos, mais cet accord permet à Londres de garder la base militaire commune avec les États-Unis. Le commentaire de Nadeem Nazurally, analyste politique et enseignant-chercheur à l’Université de Maurice.
Nadeem Nazurally : Aujourd'hui, nous sommes témoins d'un moment historique pour la République de Maurice avec la rétrocession tant attendue de l'archipel des Chagos par le Royaume-Uni. Cet événement constitue la fin d'un long et douloureux chapitre de plus de cinq décennies de revendications et de luttes pour la souveraineté mauricienne sur ces îles. En 1965, dans le cadre des négociations pour l'indépendance de Maurice, le Royaume-Uni a détaché illégalement l'archipel de Chagos de son territoire pour en faire une base militaire stratégique. Ce geste a été condamné à plusieurs reprises sur la scène internationale, notamment par la Cour internationale de justice et les Nations unies qui ont toutes deux reconnu que cette séparation constituait une violation du droit international.
Pour Maurice, cette rétrocession représente non seulement une victoire diplomatique, mais aussi une reconnaissance des droits humains, historiques et culturels du peuple chagossien qui a été expulsé de ses terres ancestrales pour faire place à la base militaire de Diego Garcia. Ces hommes, femmes, enfants, ces familles déplacées de France, ont vécu dans l'exil, principalement à Maurice, aux Seychelles et aussi au Royaume-Uni, espérant toujours revenir un jour sur leurs îles natales.
RT en français : Concernant la base militaire, Londres conserve toutefois cette base sur l’archipel. Comment analysez-vous cet accord entre les deux parties ?
N. N. : La base militaire du Gorosa reste en place [...] ça a été peut-être un compromis où Maurice récupère la souveraineté dans l'ensemble de l’archipel. [...] Je ne suis pas vraiment d'accord avec cette base militaire, et beaucoup d'autres Mauriciens aussi. Mais c'est peut-être un compromis pour le moment. Il faut voir à long terme ce qui se passe avec cette base militaire.
RT en français : Comment est perçu cet accord dans l’opinion publique des îles Maurice ?
N. N. : Il est bien accueilli, bien sûr, et c'est un grand effort du gouvernement aussi, à Maurice, qui a permis à cet accord d'être signé. Mais cependant, la lutte pour la réhabilitation des Chagossiens ne fait que commencer. Par exemple, l'État mauricien devra œuvrer pour permettre à ces familles de réintégrer la terre. Parce que ça fait plusieurs générations, ça fait cinq décennies déjà que ces familles ont été délogées illégalement, à Maurice, aux Seychelles et aussi au Royaume-Uni. L'État mauricien devra œuvrer pour permettre à ces familles de réintégrer la terre, de reconstruire leur vie et de bénéficier des ressources, et aussi l'opportunité que ces îles peuvent offrir à la longue.
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