Une note révèle les confidences de l'islamiste Salah Abdeslam sur les attentats du 13 novembre
Un document de neuf pages, reprenant des écoutes réalisées par la sûreté de l'Etat belge, révèle des conversations de Salah Abdeslam avec ses codétenus en prison à Bruges. Il explique sa cavale et comment il s'est débarrassé de sa ceinture explosive.
Peu loquace sur les événements tragiques du 13 novembre 2015 et son implication dans les attentats, l'islamiste Salah Abdeslam est plus bavard en cellule.
Alors qu'il était incarcéré dans un premier temps à Bruges en Belgique, Salah Abdeslam a notamment conversé avec deux autres terroristes, Mehdi Nemmouche et Mohamed Bakkali. Entre le 22 mars et le 17 avril 2016, la sûreté de l'Etat belge (le renseignement belge) a pu intercepter ces discussions et raconter dans un rapport de neuf pages, la version partielle de Salah Abdeslam sur les événements, ayant coûté la vie à 130 personnes et blessé 350 autres.
Une copie de ces échanges a été transmise à deux journaux : Le Parisienet Le Figaro. Les deux titres de presse ont ainsi pu publier, le 10 janvier sur leur site, une synthèse du document.
Ainsi, le récit de Salah Abdeslam se fait, selon Le Parisien, sur un «ton léger» avec parfois des rires. Il explique, par exemple, s'être débarrassé de la ceinture explosive le 13 novembre au sud de Paris après avoir déposé les trois terroristes du Stade de France, puis laissé sa Clio dans le XVIIIe arrondissement de Paris. «On dirait que je faisais 90 kilos, mon frère. Avec la sacoche [la ceinture explosive] et tout, on dirait que j'avais de grosses fesses. C'était trop voyant, je savais que je devais m'en débarrasser», déclare-t-il notamment.
Il revient de fait sur cette nuit, l'enquête ayant prouvé qu'il l'avait passée dans la cage d'escalier d'un immeuble d'une ville des Hauts-de-Seine, Châtillon. Le Parisien résume l'échange :
«- Je me suis caché dans un bâtiment des HLM, près du MacDo, là, tu vois ?
- Et t'as rien mangé ?, l'interroge Mohamed Bakkali
- Je suis parti au Mac Donald's.
- T'as acheté un petit truc ?
- Au drive, tu vois, au drive ? J'ai pris un Menu Fish.
- [rires] T'es un tueur hein !»
Durant cette nuit, Salah Abdeslam aurait alors sympathisé avec des jeunes de l'immeuble, ceux-ci voyant sur un appareil électronique les actualités. «Ça me permettait d'être à jour. Eux ils parlaient de ce qui se passait, moi je leur parlais des filles, de l'école, des métiers», s'amuse le terroriste.
Alors qu'il est exfiltré le matin par des amis pour un retour en Belgique, le djihadiste décrit les barrages routiers et une situation ubuesque, celle de se faire interviewer par la presse. Une équipe de télévision belge lui demande en effet un avis sur ces barrages routiers : «Elle [la journaliste] me dit : "Vous trouvez normal qu'il y ait des barrages comme ça ?" J'ai dit : "Oui c'est normal, vu les circonstances, il faut bien renforcer les barrages hein !"»
A l'un des barrages, la police, munie de mitraillettes, les interroge. Salah Abdeslam pensait que c'était la fin pour lui et ses compagnons. Finalement, la police ne retient pas l'auto et celle-ci peut poursuivre son chemin jusqu'en Belgique. La cavale de Salah Abdeslam durera près de 126 jours, réfugié à Bruxelles.
Dans la conversation avec les détenus, Salah Abdeslam déclare aussi s'inquiéter que la police retrouve une lettre qu'il a égarée lors de son interpellation le 18 mars 2016. Dans cet écrit, jamais retrouvé, il aurait notamment prêté allégeance au calife de Daesh.
Ces écoutes ont été versées au dossier pour un procès en France prévu pour 2021.