Pêche au Sénégal : deux compagnies pétrolières anglo-saxonnes accusées de ne pas respecter leurs engagements
Les pêcheurs de Saint-Louis, au nord du Sénégal, sont aux prises avec le géant britannique BP et l’américain Kosmos Energy. Les deux compagnies, qui développent et s’apprêtent à lancer la production du champ gazier Grand Tortue Ahmeyim (GTA), sont accusées de contribuer à la raréfaction des poissons dans la région.
Le 24 octobre, Radio France internationale (RFI) a rapporté que des pêcheurs de Saint-Louis, au nord-ouest du Sénégal, accusent la société pétrolière britannique British Petroleum (BP) et la société américaine Kosmos Energy de nuire à la population piscicole avec le lancement du projet Grand Tortue Ahmeyim (GTA).
Situé à la frontière maritime du Sénégal et de la Mauritanie, ce site est appelé à produire 2,5 millions de tonnes de gaz naturel liquéfié par an. Le projet est soutenu par la Société mauritanienne des hydrocarbures (SMH). Problème, la plateforme serait située sur le récif le plus poissonneux, a rapporté RFI.
BP, Kosmos et les pêcheurs se seraient mis d'accord à la mi-août sur la création de six récifs artificiels dans le secteur de la future plateforme afin d'y attirer les poissons, bien que, selon un communiqué de presse de BP daté du 15 octobre, il ne soit plus question que d'un seul récif.
«La parole de BP n'a aucune valeur pour nous»
«BP n'a aucun respect pour nos communautés», a fustigé auprès de RFI Mamadou Sarr, président de la Commission de l'environnement. «Les relations que nous avons avec ces compagnies sont toujours des relations heurtées», confie-t-il.
«Nous refusons d'aller seuls avec BP à la table des négociations, parce que la parole de BP n'a aucune valeur pour nous. Si l'on s'assoit autour d'une table, ce sera entre nous, BP et les autorités», a ajouté Mamadou Sarr, demandant aux autorités sénégalaises de défendre leurs intérêt face aux deux sociétés énergétiques.
Dans son communiqué de presse, la société affirme que la création du récif «reflète les engagements environnementaux et sociaux du projet». Massaer Cissé, vice-président de BP et Directeur Pays Sénégal, a déclaré que la société était «fière» de sa «contribution à ce projet révolutionnaire, qui reflète l'engagement du projet en faveur de la gestion environnementale et renforce notre partenariat avec le Sénégal».
Les pêcheurs demandent l'aide du président
Des plaintes similaires avaient déjà été envoyées aux deux sociétés début septembre, avait rapporté le mensuel Le Marin. Les pêcheurs, en collaboration avec l'organisation non gouvernementale Lumière synergie pour le développement (LSD), ont accusé les entreprises de ne pas respecter les lignes directrices de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), qui visent à minimiser les impacts négatifs des multinationales.
L'association estime également que l'étude d'impact environnemental de BP présenterait des lacunes, la jugeant «superficielle et incomplète». Elle souligne aussi le manque d'engagement de l'entreprise auprès des communautés locales. «Des cas de destruction d'engins de pêche ont même été recensés», selon Le Marin, qui ne donne pas d'autres détails.
Selon cette même source, les pécheurs demandent à présent au président sénégalais Bassirou Diomaye Faye de faire pression sur les entreprises internationales pour qu'elles respectent leurs engagements et leurs obligations de créer un récif artificiel afin de favoriser le retour des poissons.